Les sources sont des socio-écosystèmes d'une extrême importance à l'échelle du paysage car elles occupent une position particulière à l'interface entre eaux souterraines, eaux de surface, et occupation du sol. Cette position en fait un rouage essentiel dans la continuité écologique des hydroécosystèmes. Au niveau du bassin versant, leur fonctionnement dépend de plusieurs processus (recharge, minéralisation, transit de l'eau souterraine) qui se traduisent à l'échelle d'un habitat aux dimensions réduites par des paramètres structurant le biotope (débit, qualité physico-chimique, concentration en matière organique) et impactant la diversité et l'abondance de la biocénose (invertébrés et plantes principalement) à l'entrée du corridor riparien.

Si la relation entre variabilité des paramètres abiotiques et biodiversité des sources a déjà été abordée dans d'autres massifs (e.g., Alpes), soumis à des conditions hydro climatiques différentes, les systèmes créneaux du massif du Jura ont surtout été étudiés dans sa partie helvétique, et n'ont pas été documentés dans sa partie septentrionale. C'est dans cette perspective que la présente étude vise à établir une typologie des éléments structurant la variabilité des sources des versants de la haute vallée du Doubs sur environ 30 km en amont de Montbéliard (25). Cette zone est en effet représentative du massif combinant des milieux naturels et des zones prairiales témoins des activités pastorales qui ont fortement structuré les activités socio-économiques depuis le Moyen-Age.

Dans cet objectif, 20 sources aux caractéristiques géomorphologiques (i.e., hélocrène, rheocrène, limnocrènes) et environnementales contrastées (i.e., forêts, prairies) ont été échantillonnées en Janvier et Juin 2019. Elles ont été caractérisées du point de vue de la qualité de l'eau, de la texture du substrat, des paramètres physico-chimiques et des espèces animales présentes (principalement annélides, arthropodes et mollusques). Une analyse factorielle multiple a permis de dégager les tendances statistiques à mettre en lien avec les caractéristiques écologiques.

Les résultats montrent une relative homogénéité des faciès géochimiques (bicarbonatées calciques) cohérente avec le contexte géologique régional, mais une variabilité des éléments environnementaux, des paramètres physico-chimiques, pédologiques (substrats) et de la faune. En particulier en été, cette conjonction semble favoriser la présence de gastéropodes dans les systèmes à substrats fins et riches en matière organique. Les trichoptères (insectes) ou encore les hydrachnides (arachnides) semblent en revanche préférer les eaux plus pauvres en carbone organique et les substrats sableux.

Ces tendances semblent liées principalement à la conjonction entre le type géomorphologique de la source et son milieu immédiat. Ces deux caractéristiques sont fortement contraintes par la lithologie. D'une part la géomorphologie des sources dépend de la dureté de la roche qui est plus prononcée pour les roches calcaires favorisant la présence de sources rhéocrènes sur les parois (courant et oxygénation marqués). A l'inverse, les sites marneux/marno-calcaires seront des contextes préférentiels pour les sources hélocènes (émergences plus diffuses). D'autre part, l'occupation du terrain, en particulier la mise en place d'activités agricoles est contrainte par la capacité du sol à retenir l'eau, avantagée sur les lithologies marneuses / marno-calcaire qui sont des contextes préférentiels pour le pâturage, favorisant ainsi les flux de carbone organique.